Manger

26/11/2020

Un quatuor féminin de lectrices, d'horizons divers et d'âges variés, m'ont soumis un seul et même sujet.  Vaste sujet s'il en est d'ailleurs.  Tellement copieux le sujet qu'on pourrait s'en empiffrer, s'en bâfrer et en redemander, au risque même de vouloir évacuer et dégorger l'excédent...

Soumise à l'interrogatoire de LaquéeBecOise, la jeune génération française s'est exprimée de façon simple, claire et précise. Aucune ambiguïté possible, le tout se résume à un seul mot.

L'équipe des seniors québécoises - et on parle ici de la génération n+2 par rapport aux jeunettes cuvée 2000-2002 citées précédemment - fait plus dans la nuance, dans la dentelle mais l'essence même de l'idée est strictement identique si on lit un peu entre les lignes et entre les rides, pardon mesdames !

Pour rappel, la question suivante a été posée à un panel d'expertes et d'experts de tous âges, de toutes nationalités, de tous niveaux socio-économiques et de toutes idéologies politico-religieuses :

Dites-moi, en un mot, en un phrase ou plus, ce que la COVID ne vous empêchera jamais de faire !

Ou, tourné autrement :

Qu'est-ce que le Coronavirus vous incite à réaliser voire même à enfreindre allègrement ?


Au 30 octobre, Emily a répondu : Manger.

Au 4 novembre, Mathilde a textoté : Manger.

Outre-Atlantique, les ripostes ont été tout aussi spontanées :

Berthilde m'a sans scrupule avoué au 31 octobre qu'elle s'était ce jour-là octroyé une petite entorse à son régime habituellement draconien : « [...] en terme de relâchement, ce soir j'ai triché en ce qui concerne ma diète ».

Et finalement, la Madre, la Daronne, Francine, a pris tout son temps pour me révéler nonchalamment le 1er novembre que la COVID lui avait permis de « découvrir des recettes, moi qui n'aimais pas cuisiner... ».   Et je confirme, mon enfance a été sacrifiée au profit de la version canadienne des biscuits thé de LU,  des simili-sablés industriels inhumés dans une vieille boite de gâteau aux fruits léguée par ma grand-mère paternelle sans doute et vers laquelle nous étions joyeusement orientés si le pâté chinois du souper n'avait pas été suffisamment roboratif  !   Mais rendons à César ce qui est à César  :  Pour nos anniversaires, ma mère a toujours préparé de somptueux gâteaux à étages avec plein de crémage !   Merci Mom !

Le maître mot de la chronique d'aujourd'hui est donc... 

Manger !

Ou...  Bouffer en québécois,  Comer en espagnol,  Taberu en japonais,  Mangiare en italien,  Eet en afrikaans...   Ce mot se conjugue à l'infini, dans toutes les langues et pour tous les goûts possibles.   C'est à la base de la pyramide des besoins de Maslow 1).    Indispensable pour notre survie certes, mais quel plaisir que la bonne bouffe, la gastronomie, les petits plats dans les grands, la lasagne, la tartiflette, le shabu-shabu, le gâteau basque, les rillettes du Mans, le confit de canard, la tarte au sucre d'Azé, les boulettes de pattes de cochon, la crème glacée Coaticook au sirop d'érable, et j'en passe...   Le tout arrosé d'un petit Fronton bio, d'un vinho verde légèrement pétillant, d'un cidre de glace importé du Québec, d'un saké glacé ou d'un Irouléguy de derrière les fagots.   En français de France, ça s'appelle être « épicurien(ne) ».  Ca fait très classe, très raffiné, on est loin de la goinfrerie et on se dissocie totalement de l'ivrognerie.   Mais, grosso modo, ça veut dire exactement la même chose que chez moi :   ça s'appelle Aimer Manger !!    Inutile de tomber dans la boulimie - j'ai fini par l'assimiler à force de grosses bouffes de Noël dans ma belle-famille, soit 5 heures à table pour un repas de 5 à 6 services minimum - il suffit de déguster et d'apprécier le crémeux de la crème catalane, le piquant du kare risu, la note de framboise en fin de bouche du Pic Saint-Loup, la tiédeur des brownies servis avec de la glace à la vanille, le parfum du clou de girofle dans la tourtière du Lac St-Jean...  J'écris, je me régale et j'en bave de gourmandise épicurienne !! 

Il n'en reste pas moins que se nourrir stagne incontestablement à la base de la pyramide des besoins de Maslow, en bonne compagnie il est vrai...

En période de confinement, de dé-confinement et de re-confinement, alors que dépouillés de notre activité professionnelle,  relevés de nos boulots de taxi-bus maternel et d'accompagnateur aux cours de kick-boxing,  mis au ban de nos activités sportives qui donnent bonne conscience,  il nous reste tout de même, pour s'oxygéner,  les courses et surtout... la Bouffe, la Vraie !   C'est ce qui nous ramène à la Vie.   Ce qui nous replonge dans l'insouciance, la félicité et les lendemains sans souci.   Alléluia !


Manger  :  Simple, Basique pour reprendre l'expression d'OrelSan 2).  Fait l'unanimité sur terre, en haute mer, dans les airs et même dans tout l'Univers.   Preuve en est  :  ces vilains trous noirs qui gobent avidement toute matière en dispersion dans le vide intersidéral.   Et d'ailleurs, dans le film Gravity, ce cher George Clooney -  OK, il est appétissant, c'est vrai  -  n'a-t-il pas fait les frais de la gourmandise démesurée du vacuum spatio-temporel ? 

Mais revenons à nos moutons abandonnés temporairement à leur festin d'herbage dans les verts pâturages et sacrifions-nous au partage d'une nouvelle tranche alléchante de mon enfance, au grand malaise sans doute de mes enfants...

Les paroles de la chanson d'Angèle Arsenault  -  la Mireille Mathieu du Québec mais en blonde plutôt qu'en brune  -  ont bercé l'appétit de mes jeunes années.   Et sont toujours, malheureusement pour moi, d'actualité  ! 


Retour au présent  :  Qui peut me certifier en me regardant droit dans les yeux que la Bouffe, le Mangiare, le Bon Niam Niam, n'a pas comblé une ration importante de son quotidien pendant le 1er confinement en France  ?  Adieu Liberté, on compense avec une bonne tablée, une bonne becquetée, un bon pâté  ?!

Au Québec, je ne sais pas mais ici en France, certaines et certains ont fait fortune en présentant, à l'heure privilégiée de l'apéro, des cours de cuisine filmés en direct depuis les fourneaux perso d'un maestro étoilé.   Je ne donnerai pas de nom.  Bon OK, y'a Cyril Lignac mais comme j'ai une copie piratée de son livre tiré de ses émissions quotidiennes, je n'irai pas cracher dans son Parmentier de canard... car j'y ai goûté et il est vraiment très très bon !

Autre vérité qu'on m'a livrée  :   Si tu ne manges plus,  si même les biscuits simili-sablés industriels te restent en travers de la gorge, c'est qu'il y a vraiment un souci, un problème, une grosse merde.   Il faut consulter.  Sauf si tu t'appelles LaquéeBecOise et que ta chanson préférée de minote 3) était « Moi j'mange » d'Angèle Arsenault...

Emily, Mathilde, Berthilde et Francine nous ont aujourd'hui livré le 1er épisode de la saga  triptyque « Mange, Prie, Aime » inspiré du roman bien connu  de Elizabeth Gilbert 4).   Et donc attachez votre tuque avec d'la broche 5) parce que ça va swinguer par-là quand LaquéeBecOise va débouler avec la suite !


Inspiré de faits réels extorqués de nos auteures du jour et pour lesquels elles n'ont pas souhaité conserver l'anonymat


1)  https://theconversation.com/comment-le-coronavirus-rehabilite-la-pyramide-des-besoins-de-maslow-132779

2)  https://www.youtube.com/watch?v=2bjk26RwjyU, et je vous conseille de ne pas stigmatiser sur les premières secondes du clip qui pourrait choquer avec le mot en C. les oreilles plus âgées car le reste de la chanson est nettement plus songé et mérite vraiment d'être écouté.

3)  Signifie « enfant ou petite fille », https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/minot/

4)   Elizabeth Gilbert, Mange Prie Aime, Calmann-Lévy, 2014, https://books.google.fr/books/about/Mange_Prie_Aime.html?id=GmCPBQAAQBAJ&source=kp_book_description&redir_esc=y

5)  Signifie « anticiper sur une situation qui s'annonce mouvementée », https://www.je-parle-quebecois.com/lexique/definition/attache-ta-tuque-avec-dla-broche.html

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